La littérature congolaise du secteur des médias vient de s’enrichir d’une nouvelle publication. L’ouvrage collectif est l’œuvre de cinq anciens journalistes de l’Office zaïrois de radiodiffusion et de télévision – OZRT – aujourd’hui RTNC. Les auteurs y racontent leurs expériences de lutte pour la libre expression dans ce média public sous Mobutu.
« Presse et démocratie en RDC, le combat de l’APARD », tel est l’intitulé de cet ouvrage coécrit par Charles Dimandja Wembi, Sylvestre Ntumba Mudingayi, Charles Ndjungu Simba, Léonard Mulamba Kalala et Jean-Réné Mputu Biduaya, tous anciens journalistes à l’OZRT aujourd’hui RTNC. Edité aux éditions Pangolin en 2020, le livre de 156 pages est préfacé par le professeur d’histoire Isidore Ndaywell è Nziem. Il a été baptisé le samedi 10 octobre 2020 à Kinshasa.
Dans sa structuration, « Presse et démocratie en RDC, le combat de l’APARD » comporte quatre chapitres essentiels en dehors de l’avant-propos, de la préface, des témoignages sur les auteurs et leur combat, et de la conclusion générale.
Dans la premier chapitre évoquant « le jour où tout a failli basculer », les auteurs reviennent sur le contexte des ouvertures démocratiques décrété le 24 avril 1990 au Zaïre et exposent les couleurs et les couleuvres de la dictature de Mobutu dont les lueurs de la démocratisation annonçaient la fin, mais sans que celle-ci n’arrive.
Le second chapitre est consacré à la révolte de ces journalistes qui, sous la dictature mobutienne, revendiquent plus de liberté d’informer pour eux, et de liberté d’expression sur la chaîne nationale, l’unique au Zaïre de l’époque, en faveur de tous les courants d’opinion. Ces révoltés se baptisent alors « les enfants de Cibitoke », du nom de cette province du Burundi où se retrouvèrent le Président Mobutu et son homologue burundais devant des enfants aux pieds nus et en guenilles, dansant à leur gloire. De enfants pauvres devant les tenants d’une oligarchie compradore. C’est cette révolte qui les amène à structurer leur combat à travers une organisation dénommée Association Pour un Audiovisuel Responsable et Démocratique (APARD). Leur combat vise alors à obtenir plus de marge de manœuvre pour faire du journalisme autrement, au profit du plus grand nombre.
Dans le troisième chapitre de leur ouvrage intitulé « Ciseaux d’Anastasie et Cartes blanches », les « enfants de Cibitoke » font une description de l’OZRT de l’époque ainsi que toutes les pratiques de désinformations qui s’y vivaient, notamment les amputations de certains faits avec des ciseaux et la déformation de l’information à travers des cartes blanches, du reste consacrées à la gloire de Mobutu.
Enfin, le quatrième chapitre examine la situation de ce combat et tente d’en déceler ce qu’il en reste. Les auteurs y évoquent un combat inachevé.
Commentant cet ouvrage qu’il a présenté, le Professeur Budim’bani Yambu le considère, d’abord, comme une invitation des auteurs à parfaire ce qui aurait dû être parfait. Une invite qui découle de l’expression d’un sentiment d’amertume, de désillusion ou encore d’impuissance des auteurs qui constatent que rien n’a changé malgré leur combat.
Un ouvrage qui, malgré tout, est un éloge de la témérité et de l’idéal par rapport au contexte du combat, mais aussi un éloge à l’échec dans un combat inégal pour trouver les moyens d’atteindre l’idéal. Et en définitive, conclue Bundimbani, les auteurs auront gagné en perdant.
Enfin, le prof Budim’bani a salué en ces auteurs, des plumes alertes et éprouvées qui relatent l’histoire dont ils ont été aussi bien témoins qu’acteurs. Il a également salué leur publication qui, selon lui, est une invitation à la recherche de la lucidité pour savoir écrire la vraie histoire, une invitation aussi à réapprendre à lutter pour la démocratie.
Jonas Eugène Kota